L'Esprit de la Forêt (PV)

L'esprit de la forêt

Shado Kodokuna & Hebi On'na

 

-Crois-moi, petit, s'il y avait un démon à l'intérieur de toi, de un, je le saurais et de deux, tu ne serais même pas vivant, alors arrête de fantasmer sur une réalité qui ne sera jamais la tienne. Disons plutôt qu'une chose indescriptible s'est approché de toi avant de ta naissance et a posé sur ton front, un baiser contagieux. Il existe bien quelques individus uniques ayant été touché par l'invisible. Je me souviens avoir entendu vaguement parlé d'une femme qui est née avec des yeux de l'océan, ah, ces yeux là, ils sont des prisés par les marchands et les nobles, car l'eau, c'est bien pour protéger ses possessions contre les flammes. Oui, se marier à des yeux bleus, remarquable...

Voilà qu'elle comblait la conversation de digressions, mais celles-ci n'étaient pas sans importance. Ce jeune homme était peut-être unique dans la norme, mais il n'était pas si seul que ça dans son genre. Il y avait beaucoup d'histoire d'individus naissant avec des attributs physiques sortant de l'ordinaire, que cela soit des difformités dégoûtantes ou alors des traits particuliers comme des yeux bleus sortant de l'ordinaire brun ou noir ou des cheveux de feu comme cet idiot assit devant elle. C'était étrange, certains auraient pu penser que les chamanes étaient de ces curieux personnages à dévoiler des attributs peu communs, mais en fait, ils étaient les plus banales de tous. Hormis les visions, les charmes de protection et la communication avec les esprits en général. Finalement, elle n'était pas prête d'échanger ses dons si précieux pour de beaux et intrigants yeux bleus.

- Je pense que ce titre est débile et peu original, lui rétorqua-t-elle franchement avec un expression peu amusée s'affichant sur son visage. Je suis certaine que ton éducation te permet de trouver mieux. Quoique, tu n'as rien d'un poète...

Elle haussa des épaules, peu impressionnée par le personnage qui se prélassait sous ses yeux. La chamane ne comprenait pas se qui avait déclenché une telle fureur dans le coeur de cet homme. Oui, elle savait ou avait une excellente idée de sa situation et du pourquoi du comment, mais elle ne pouvait pas crier sur tout les toits qu'elle comprenait entièrement. Son empathie humaine avait ses limites tout comme ses pouvoirs qui n'arrivaient pas à la taille des divinités là-haut de ses ancêtres immortels. La vie était une toile tissée de complications, surprises, joies et regrets. N'était-ce pas cela qui nous rendait plus vivant, au final?

Un petit sourire en coin ourla ses lèvres sous son monologue. Lorsqu'il eut terminé, elle soupira doucement en balayant l'air de la main comme si elle chassait ses mots perdu dans l'air ambiant. Leurs destins s'étaient liés par d'étranges circonstances, mais elle n'allait pas dire que cela lui déplaisait. Sa vie était souvent si morne, si banale, si normale, en tout cas, ce qui était normal pour une vie de chamane. Cela ne lui dérangeait pas d'essuyer quelques conneries de la part de ce bâtard chamanique.

- Quelques alliés ne te feraient pas de mal et je n'ai jamais entendu parler d'un chaos à long-terme créé par un seul homme, car c'est ce que tu es, un seul homme. La voie solitaire ne t'amènera à rien, voilà peut-être pourquoi les esprits m'ont indiqué l'existence du jeune homme en quête d'aventure. Tu es encore jeune et la vengeance est un plat qui se mange froid. Prendre ton temps serait te rendre un service.

Ses yeux retombaient sur le tas de braises fumantes à ses pieds, réchauffant à peine les extrémités de ses orteilles froids. Les Lunes Rouges n'avaient rien de plus que lui, disait-il. Ils avaient certainement plus d'honneur, peu importe ce qu'il croyait à leur sujet. Personnellement, elle connaissait les Lunes Rouges de Soriyeo que de réputation et d'histoires héroïques qu'elle considérait peu intéressantes. Elle était une Kyangaise, elle en avait rien à faire des armées des nations voisines, exceptée s'ils osaient mettre les pieds sur ses terres. Quoi? Une chamane avait bien le droit d'être patriotique lors de ses heures perdues à côtoyer un psychopathe sans foi ni loi.

- L'étendard suffira amplement, je ne désire pas que tu apportes la poisse dans mon antre, quoique, à ce moment-là, je serai certainement en train de parcourir les routes du monde, on ne se retrouvera pas aussi facilement, quelle tristesse! confessa-t-elle avec un sarcasme si cru qu'il en était non comestible. Lorsqu'il mentionna qu'elle conservait sa tête simplement parce qu'il voulait voir l'expression qu'elle afficherait lors de son impossible victoire, elle sourit. C'était un petit sourire mystérieux, emplit de secrets et d'une arrogance propre à elle. Oui, c'est ça, si tu le dis, beau prince des enfers.

« S'il croit que je suis sans défense, il peut se mettre le doigt dans le fin fon de son trou du... » pensa-t-elle en haussant un sourcil agacé et en censurant ses dernières pensées sous ses paupières fermées. Il n'est pas de son devoir de mettre fin à son existence aujourd'hui, peut-être plus tard. Cependant, il ne repartirait pas sans quelques gouttes de son poison chamanique. À croire qu'il ne connaissait rien à son élite. Il avait été si facile de l'embobiner à lui prendre les mains et la malice avait mieux passé sous ce contact déguisé en rituel. Quoique, pas si déguisé que cela puisque c'était nécessaire en fin de compte. Bref, il était dans la merde et elle se réjouissait de cela. Évidemment, il allait certainement hausser les épaules, se moquer de son châtiment de manière arrogante, mais cela changerait rapidement lorsqu'il se mettrait à avoir du mal à dormir sous les plaies nouvelles, que son corps se recouvrirait de cicatrices poisseuses et que son corps guérirait mal, car nul ne pouvait dire si une brûlure ne repasserait pas sur une vieille marque ayant à peine entamée la guérison. Oui, elle s'amuserait à ses dépends. Elle jubilerait comme ses lames, la...

Une demi-heure plus tard, les braises s'allumaient brièvement, révélant un étrange éclat que seule la chamane pouvait comprendre aisément. Il avait déjà commis ces actes de violence et il en ressentait les conséquences. Le feu était son élément, elle pouvait plonger dans les flammes sans craindre pour son esprit. Elle jeta une vieille bûche dans le feu mourant, celle-ci fut aussitôt lécher par des flammes brillantes. La lame du chaos poursuivrait son chemin et elle le sien, accompagnée de son loup afin de conclure sa propre mission et mettre un terme à sa fascination.

Peut-être qu'un jour, ils tomberaient à nouveau sur le chemin de la lame rousse.